Historique
Lorsqu’en 1879, la Comité archéologique de Senlis se porta acquéreur de ce Christ roi crucifié, il avait subi quelques dommages. Arraché de son support originel, ayant perdu les doigts de la main gauche et les figures d’appliques dont les emplacements à l’extrémité des branches sont visibles, il ne restait que deux petites pierres de verre comme en témoigne un dessin aquarellé de 1882. Le Christ présente les caractéristiques de l’Oeuvre de Limoges (opus emovicense), selon l’expression utilisée au Moyen Âge pour désigner les productions d’objets de cuivre émaillé champlevé des ateliers limousins : emploi de l’émail champlevé sur le perizonium, linge entourant les hanches (bleu outremer et ceinture doré) et sur le suppedaneum, tablette supportant les pieds du Christ (traces bleu outremer) ; usage de nombreux cabochons ; reprise en fine gravure du modelé du torse. Le Christ était probablement entouré de la Vierge au bras gauche, de saint Jean au bras droit et de deux saints en général anonymes aux extrémités de la haste. Avec ses grands yeux ouverts, dotés de perles d’émail bleu nuit, c’est encore un Christ roman apparaissant glorieux et triomphant de la mort. Les genoux fléchis, la tête inclinée et le modelé du torse indiquent un traitement plus naturaliste et l’émergence de l’image gothique du Christ souffrant. à la charnière des deux styles, cette croix est datable du 2e tiers du XIIIe siècle. Le décor du revers représentait sans doute le tétramorphe dont seul subsiste un homme ailé, symbole de l’évangéliste Matthieu. Les motifs ornementaux tels que les étoiles à quatre rais, les losanges émaillés et les petites fleurs font appartenir cet objet à un groupe bien répertorié dit « à fond étoilé ».